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La pensée d'un esprit libre

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RELATIVITÉ DIABOLIQUE DU TEMPS


SablierIl est difficile de rester raisonnable quand on s’attaque au mystère du temps. Quelqu’un à dit : le Temps c’est Dieu, car il est infini, éternel, inconnaissable et tout puissant.
En introduction, je vous propose de vous restituer une curieuse anecdote dont le Temps, le Diable et un alchimiste sont les héros. L’Alchimiste, pour avoir les secrets de la transmutation, avait signé un pacte avec Satan le 5 octobre, fête de saint François d’Assise, en l’an de grâce 1573. Il s’agissait d’un bail 3-6-9 que le preneur signa avec son sang, s’engageant à donner son âme à l’expiration, soit au bout de neuf années, jour pour jour. Il avait la possibilité de le résilier tous les trois ans, mais le Diable savait à qui il avait à faire et n’était pas inquiet.

La première année, il donna le secret de l’or et l’alchimiste devint très riche, la troisième année, il donna le secret de la puissance et l’Alchimiste devint un personnage considérable ; la sixième année, pour éviter la résiliation il donna le secret de jouvence et l’Alchimiste cessa de vieillir.

Mais arriva la neuvième année, et le Diable, le 4 octobre, tard dans la soirée, vint frapper à la porte du prédestiné à l’Enfer. Des laquais lui ouvrirent et le précédèrent dans une somptueuse salle de festin où deux couverts étaient mis : plats d’or et gobelets de vermeil, vins de France et mets succulents, fruits à point et desserts des îles.

— Or ça, dit le Diable, j’imagine, mon compère, que tu veux quitter ce monde en grande liesse ?

— Je vous attendais, messire Satan, et vous prie à souper en ma compagnie, s’il vous plaît !

Il n’était guère que 10 heures après le couvre-feu et le Diable se dit qu’il lui serait agréable de festoyer en attendant de prendre sa livraison, à minuit. Il s’assit donc devant l’Alchimiste et lui fit raison, jetant de temps en temps un regard vers la pendule, car rien n’est si cher au cœur d’un diable que la possession d’une âme de chrétien. Enfin les aiguilles marquèrent minuit moins deux minutes et Satan ne put se contenir.

— Mon compère, il faut te préparer à me suivre. Dans deux minutes révolues, nous serons au jour de demain. Ce qui a été conclu a été conclu !

— C’est-à-dire ? demanda l’Alchimiste.

— C’est-à-dire, que le 5 octobre 1573, tu as signé un pacte avec moi, me donnant ton âme neuf ans jour pour jour. Un pacte est un pacte, nul ne saurait y contrevenir !

— Et quand devrai-je vous donner mon âme, messire Satan ?

— Le 5 octobre… Soit dans une minute trente secondes exactement.

— Vous dites bien le 5 octobre ?

— Oui, je dis le 5 octobre… Ni le 4, ni le 6, mais le 5 et je vais me servir.

— Une seconde, s’il vous plaît messire !

Ayant dit, l’Alchimiste frappa dans ses mains et deux frères lais pénétrèrent dans la pièce.

— Tu es perdu, compère, ricana le Diable. Les frères lais n’y peuvent rien, ce qui est signé est signé et…

La pendule égrena les douze coups de minuit dans un silence solennel et le Démon poursuivit :

— Nous sommes maintenant le 5 octobre, ton âme est à moi !

— Erreur ! s’écria le prétendu damné. Erreur, messire Satan ! Demandez plutôt à ces frères ! Ils doivent dire la vérité et, si nous sommes le 5 octobre, je vous devrai mon âme !

— Eh bien, dit Satan s’adressant aux frères, quel jour sommes-nous ?

— Ce jour d’huy est le 15 octobre de l’an de grâce — on peut le dire — 1582, par décision de Sa Sainteté Grégoire XIII qui vient de réformer le calendrier Julien, Dans tous les États catholiques du monde, ce jour est le 15 octobre !

— Vous le jurez ? demanda Satan.

— Nous le jurons devant Dieu dirent les frères lais.


Il y eut un grand tourbillon de flammes et de fumée, une nauséabonde odeur de soufre et le Diable disparut. C’était vrai : le 5 octobre 1582, le Temps avait fait un saut de chat pour remettre en place l’équinoxe du printemps, qui avait rétrogradé de dix jours par la faute du calendrier de Jules César. Le Papa avait ordonné que ce 5 octobre deviendrait le 15 et l’Alchimiste, lui, s’appelait le comte de Saint-Germain.



1 — GENÈSE DE LA NOTION DE TEMPS


Depuis l’aube de notre civilisation, de nombreux penseurs se sont penchés sur le temps, notamment parmi les plus connus : Zénon d’Élée, Parménide, Leucippe, Épicure, Platon, Aristote, Plotin, Saint Augustin, Descartes, Newton, Kant, Leibniz, Laplace, Hegel, Einstein, Bergson, Minkowski, Husserl, Russel, et tous ceux que j’ai omis. Nous laisserons à chacun d’approfondir, selon son degré d’intérêt, leurs pensées à partir des ouvrages de référence et encyclopédies adéquats. En conséquence, dans ce chapitre, nous ne ferons qu’un bref rappel de quelques idées généralement admises.


De prime abord, il nous faut constater que la notion de temps semble englober trois concepts : la simultanéité, la succession et la durée, auxquels il faut ajouter les trois concepts de présent, de passé et d’avenir. Mais pour approfondir ces notions nous devons nous référer à des concepts initiaux et généralement admis à notre niveau de connaissance actuelle.


L’espace, la matière et le temps en physique classique


Qu’est-ce que l’espace ? Qu’est-ce que le temps ? Qu’est-ce que la matière ? Qu’est-ce que la lumière ? Qu’est-ce qu’une loi physique ? La physique classique a sans doute forgé en nous, hommes du XXIe siècle, à la fois des termes de ces questions et leurs réponses spontanées. En effet, dans l’enseignement secondaire et technique tout ou moins, dans la plupart des domaines techniques et industriels, et plus généralement dans la vie quotidienne de chacun de nous, les concepts, les termes des questions et les réponses de la physique classique sont le cadre dominant de la pensée scientifique.

Une bille qui roule, un oiseau qui vole, la lune qui se déplace dans le ciel, ce sont des observations de tous les jours. Ces éléments de réalité possèdent un point commun : le mouvement.

La pertinence et la spécificité de la démarche scientifique pour analyser les phénomènes où intervient le mouvement ont été et sont toujours de mettre en avant trois entités, les plus fondamentales, depuis la Renaissance, de toute l’activité scientifique : l’espace, le temps et la matière. Ces trois catégories constituent la base de la problématique scientifique moderne, en rupture avec les concepts dominants du passé (les quatre éléments).

L’espace et le temps sont le cadre du puzzle univers. La matière et la lumière en constituent les pièces en physique classique. Enfin les lois physiques sont en quelque sorte le motif du puzzle. C’est ainsi que la problématique de la physique classique pourrait se résumer. On aurait pu aussi utiliser l’analogie avec une pièce de théâtre : l’espace et le temps forment l’espace scénique, la scène nue du théâtre ; les acteurs sont la matière et la lumière ; le thème de la pièce, ce sont les lois physiques.

Les principales caractéristiques de l’espace et du temps sont l’infinité et la continuité. L’espace s’étend continûment, partout, et même plus loin que jamais on pourra l’imaginer. L’espace et le temps ont, en physique théorique classique, une existence en soi ; ce sont des réalités indépendantes des objets qui y sont en mouvement et des sujets pensants que nous sommes. Le temps se déroule imperturbablement sans se préoccuper de la matière et de la lumière. L’espace est là de tout temps.

Pour ce qui concerne la matière, la physique classique s’accommode bien (à condition que l’on n’y regarde pas de trop près) de la conception atomiste : les atomes constituent le substrat des diverses formes que revêt la matière : solide liquide et gazeuse.

En physique classique, la matière se distingue de la lumière qui est interprétée comme un phénomène ondulatoire. Les phénomènes ondulatoires sont liés au mouvement des particules d’un milieu matériel. C’est pourquoi, en physique théorique classique, on avait induit l’existence d’un fluide matériel, qui serait le siège des ondes lumineuses, l’éther. L’infirmation de cette hypothèse par l’expérience de Michelson a provoqué un fort ébranlement du cadre de la physique classique. D’autre part, avec la théorie du photon, on a mis en évidence l’aspect corpusculaire de la lumière. Il en résulte que la distinction matière/lumière devient superflue, tout au moins au niveau de la conceptualisation de base.


L’univers macroscopique et microscopique


L’univers est l’ensemble de tout ce qui existe, il est éternel, infini, incommensurable, hors de portée des sens et de l’esprit humain. Néanmoins, pour avoir la possibilité de l’étudier plus commodément et de satisfaire leur curiosité, les physiciens imaginent des univers infinis et se bornent à explorer celui qui leur est perceptible.

Ainsi notre univers aurait un diamètre de 20 milliards d’années-lumière et un âge de 10 à 15 milliards d’années. Ce qui est totalement contesté par d’autres chercheurs qui pensent que ce n’est seulement l’âge de notre galaxie. Aujourd’hui, on ne peut parler de l’univers sans faire référence à l’élémentarité et à l’emboîtement des structures.

La conception atomiste répond à une donnée qui s’impose avec toujours plus de force au fur et à mesure que la science se développe et qui est l’emboîtement des structures. La théorie moderne de l’élémentarité s’est considérablement enrichie par rapport à celle des philosophes grecs : elle s’est construite au travers de la méthode scientifique, c’est-à-dire grâce à une abstraction sans cesse plus travaillée et une pratique de vérification expérimentale toujours plus affinée. Ainsi, on s’est très vite rendu compte que les « grains de liquide » (comparables aux grains de sables) n’étaient pas des atomes, au sens qu’ils ne sont pas insécables. C’est pourquoi on a introduit le terme de molécules pour désigner des assemblages chimiquement stables d’atomes qui constituent les briques de la matière macrocosmique. Tout le monde sait maintenant qu’à partir de la molécule, c’est un véritable emboîtement de « poupées gigognes » qu’il faut faire appel pour décrire la chaîne de l’élémentarité : les molécules sont faites d’atomes ; les atomes ne sont pas insécables (mais on continue à les appeler atomes ; premier avatar terminologiques ; il y en a de nombreux autres). Les atomes sont des « micro-systèmes solaires » comportant un noyau central, entouré de quelques planètes, des électrons, qui forment un nuage d’orbites. L’électron semble être une particule élémentaire ; tout au moins, en l’état actuel de nos moyens de connaissance, il l’est. Les noyaux, eux, ne sont pas élémentaires. Ce sont des assemblages très compacts de nucléons de deux types, les protons et les neutrons. Jusqu’à une période récente, les nucléons étaient considérés comme élémentaires. L’une des plus grandes avancée de la physique des particules des années soixante et soixante-dix a été la mise en évidence d’un niveau d’élémentarité sous-jacent au nucléon. C’est le niveau des quarks : le nucléon est composite, c’est assemblage de trois quarks.

Selon la théorie actuelle de l’élémentarité, l’électron — comme les autres membres de la famille des leptons à laquelle il appartient — et les quarks sont les briques fondamentales de la matière : dans tout l’univers, toute la matière est faite de quarks et de leptons. Les deux sont en nombre restreint, mais peut-être pas assez restreint pour que les théoriciens puissent s’en satisfaire : dix-huit quarks et six leptons, cela pourrait suggérer que ces particules ne sont pas le bout de la chaîne, qu’il y a un ou d’autres niveaux plus profonds d’élémentarité. On a déjà donné des noms aux hypothétiques constituants des quarks et des leptons : les préons ou rishons.

Partant de la molécule, essayons maintenant d’explorer la chaîne d’emboîtement, dans l’autre sens. À partir de la molécule, on forme la matière macroscopique. Sur terre, le plus grand ensemble de matière que l’on puisse concevoir est la terre elle-même, avec tout ce qui existe, vit, se développe sur notre bonne vieille planète. La terre est une planète. C’est élément d’une nouvelle structure, le système solaire, constitué par le soleil entouré des planètes qui orbitent selon les lois de la gravitation. Le soleil est une étoile, de taille moyenne, et bien qu’on n’en ait pas la confirmation directe, il doit exister des quantités énormes d’étoiles, qui comme le soleil, sont entourées de systèmes de planètes. L’étoile soleil fait partie de notre galaxie la « Voie lactée », une région du ciel à très haute densité d’étoiles.

Il y a d’autres galaxies que la nôtre. Elles ne se répartissent pas uniformément dans l’univers, mais se groupent en amas de galaxies. Notre galaxie appartient à « l’amas local ». L’amas est une nouvelle structure dans laquelle les galaxies, avec leurs milliards d’étoiles, peuvent être considérées comme ponctuelles.

Il semblerait que les amas de galaxies eux-mêmes se groupent en superamas. L’échelle de distance correspondant à cette structure extrême est la centaine de mégaparsecs. Le parsec est une unité de distance utilisée en astronomie : c’est la distance à laquelle l’orbite de la terre autour du soleil aurait un rayon apparent d’une seconde d’arc. Autrement dit, une étoile qui serait à un parsec de nous se déplacerait dans le ciel d’une seconde d’arc (un trois mille six centième de degré) en trois mois (à cause du mouvement de la terre autour du soleil). Un parsec vaut environ trois années-lumière. L’année-lumière est une autre unité utilisée en astronomie. C’est la distance parcourue par la lumière en une année à raison de trois cent mille kilomètres à la seconde. Un parsec représente donc environ 30 000 milliards de kilomètres. Cent mégaparsecs, cela veut dire cent millions de parsecs, soit trois mille milliards de milliards de kilomètres. C’est à cette échelle de distance que l’on situe actuellement les limites de l’emboîtement. En d’autres termes, c’est lorsque l’on peut considérer un superamas de galaxies de cent mégaparsecs de diamètre comme ponctuel que l’univers nous apparaît uniforme et homogène.

À l’autre extrémité, la limite d’emboîtement se situe à l’échelle la plus petite accessible (à laquelle les leptons apparaissent ponctuels) qui est de l’ordre du centième de fermi. Le fermi (en l’honneur du physicien nucléaire Enrico Fermi) est une unité de longueur valant un dix millième de milliardième de centimètre (10-13 cm). Ainsi, quarante et une puissances de dix séparent les limites extrêmes de l’emboîtement des structures. Il est évident que la physique et toutes les autres formes de sciences doivent prendre en compte cette donnée fondamentale.


Par conséquent, donner une définition précise du temps est impossible. Tout au plus, peut-on dire qu’il est une sorte de mesure de la vie, extrêmement fluctuante, perçue différemment par le conscient et l’inconscient, par les philosophes et les scientifiques.


Ces connaissances sont indispensables à qui veut aborder le mystère du passé, du présent et du futur, sur tous les plans : philosophique, historique, social, initiatique et scientifique. Car l’homme appartient fondamentalement à l’univers et tous ses problèmes ont une résonance de l’infiniment petit à l’infiniment grand, ce qui répond à la loi d’Hermès Trismégiste : « Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ». Ceci voudrait-il dire que l’univers serait à l’image de l’atome ? Pour le moment les savants ne le croient guère pour la raison principale qu’ils identifient de nombreux types d’atomes, tous dissemblables, de texture peu stable, agités par de puissantes forces tourbillonnantes.

L’atome semble un complexe organisé, avant l’explosion ; l’univers est un complexe organisé après l’explosion.



2 — LE TEMPS VU PAR LES PHILOSOPHES ET LES ORDRES TRADITIONNELS


« Le temps n'est rien d'autre qu'une forme de la sensibilité interne, c'est-à-dire, des intuitions du moi et de notre état intérieur, car le temps ne peut pas être une détermination d'un phénomène extérieur. Il n'a rien à voir ni avec la forme ni avec la position ; au contraire, il détermine le rapport entre les représentations de notre état intérieur ». EMMANUEL KANT, 1724-1804


Pour le philosophe, le domaine du temps et de l’espace peut être abordé de trois points de vue différents : le percept, le concept et l’absolu. Le premier ou percept, concerne notre perception empirique de ces phénomènes, c’est-à-dire, la manière que nous semblons les percevoir à l’aide de nos organes des sens. Ainsi l’expérience la plus courante est qu’il nous semble percevoir visuellement une condition comme l’espace vide, quelque chose dépourvu d’objets. Il y a de même, une perception du temps. Il y a ce qui apparaît comme maintenant, ou présent, aussi bien que ce qui apparaît comme le passé ou comme le futur. Cette qualité perceptive est entièrement apparentée à la conscience humaine, à notre conscience de ces conditions qui donnent naissance aux notions de temps et d’espace. Par conséquent, pour la plupart des gens, le temps et l’espace sont acceptés comme ayant autant de réalité que les formes matérielles qu’ils perçoivent. En fait, pour eux, le temps et l’espace sont des qualités déterminantes du monde.

Le temps et l’espace conceptuels sont ce que nous concevons en pensée. Si nous avons une théorie sur la nature de l’espace — en dehors de la forme que lui donne notre perception — alors, c’est conceptuel. Si, par exemple, nous supposons que le temps et l’existence n’ont pas d’existence en dehors de la conscience humaine et du mécanisme de nos sens, c’est alors un temps conceptuel. Nous pouvons dire que les différentes idées, du temps et de l’espace, professées par les philosophes sont conceptuelles, car elles n’étayent pas entièrement nos perceptions normales de ces phénomènes.

En bref, parler du temps et de l’espace absolus, c’est assumer qu’ils ont une nature absolue, concrète, très différente des formes dont nos perceptions sensorielles nous rendent compte. Qui plus est, de tels phénomènes absolus peuvent ne pas correspondre à notre conception de ce qu’ils peuvent être. En d’autres termes, ils peuvent être entièrement différents de la conception que nous avons d’eux.

Une brève présentation des notions d’espace, professées par quelques-uns des philosophes classiques, illustrera la manière dont nos vues peuvent se diviser en ces catégories de perceptive, conceptuelle, et absolue.


Parménide, philosophe du V° siècle avant J.C., avait pour doctrine que l’Être est un bloc solide. L’Être est tout, et il remplit l’espace. Il n’y a par conséquent qu’un Être unique et il ne peut donc y avoir d’espace vide : celui-ci est une illusion. Ce que l’homme appelle espace ou non-Être est illusion. Voici donc une idée conceptuelle de l’espace. Elle n’est pas en accord avec l’expérience ou la perception ordinaires.


Le philosophe grec ancien Leucippe déclarait que la seule nature de l’Être est « la propriété de remplir l’espace ». Mais il soutenait en outre que s’il y a pluralité de choses (comme il apparaît aux sens) et si ces choses sont séparées les unes des autres, alors cette séparation doit être non-Être (espace). Il accordait à cet espace vide une réalité métaphysique, une sorte de substance illimitée. C’était vraiment une sorte d’Être différent que l’Être limité, que les choses finies venaient occuper. Dans cette explication, Leucippe tentait de concilier l’expérience commune de la perception et une conception métaphysique.


Pour Platon, la matière en général est espace. Elle ne prend ni forme, ni nature particulière jusqu’à ce qu’elle participe, ou corresponde, aux idées que nous nous faisons d’elle. C’est une espèce spéciale de néant dont le monde est formé pour le besoin des idées que nous avons. Dans une œuvre appelée « Le Philebus », Platon enseigne que notre monde de perception est un mélange d’illimité (espace) et de limité, c’est-à-dire de formes mathématiques ou d’objets mesurables. La cause de ce mélange, affirme Platon, est l’idée que nous nous faisons de Dieu. Plus simplement, nous avons en nous une qualité divine qui oblige « l’espace à prendre des formes mathématiques pour devenir semblable au monde de nos idées ».


René Descartes, assure que la spatialité, ou qualité de remplissage de l’espace, est attribut originel de la réalité. En ce sens, l’espace est une qualité qui existe extérieurement à l’esprit en tant que partie de la réalité et la perception que nous en avons n’est pas illusoire. Il ajoute : « Tout ce qui est, est espace ou conscience… Ce qui est espace n’est pas conscience ; ce qui est conscience n’est pas espace. La certitude de nous-même, ou notre conscience, par conséquent, n’est pas spatiale, quoique notre corps le soit. »


Saint Augustin, un des premiers Pères chrétiens, proclamait que le temps n’a pas de signification réelle, il n’a de signification que « pour le fonctionnement de l’expérience intérieure ». Lorsqu’elle mesure ce qui est perçu objectivement et se compare à lui. Il dit, de même, que le temps est un facteur utilisé par l’expérience extérieure pour mesurer et comparer ce que perçoivent les sens. Le temps n’a alors pas d’existence en soi mais n’est qu’un étalon dont se sert la conscience, une catégorie dont elle se sert pour ranger, dans un ordre plus compréhensible, les choses dont nous faisons l’expérience.


La question posée ici concerne également le philosophe Kant, ses notions de temps et d’espace, et la manière dont elles se comparent au point de vue de l’A.M.O.R.C. (Organisation philosophique et fraternelle) sur ces sujets. Kant déclare que le temps et l’espace sont de « pures formes de sensibilité ». Ceci signifie que la conscience a les moyens de coordonner les sensations qu’elle reçoit en fonctions des « Lois perpétuelles » qui ne varient pas avec l’individu ou avec son expérience particulière. Plus simplement, nous avons un sens a priori. Nous avons, innées dans notre conscience, des formes pures de perception, modèles de temps et d’espace, auxquels s’adapte tout ce qui est expérience objective. Nous n’avons pas acquis ces modèles, ou catégories de temps et d’espace, à partir du monde extérieur ; ils font partie de notre être. Cependant, nous ne nous rendons pas compte de ces perceptions intérieures du temps et de l’espace tant que nous ne percevons pas objectivement les choses du monde. Ces choses sont coordonnées aux perceptions pures de temps et d’espace ; c’est-à-dire qu’elles s’ajustent aux modèles et ont pour nous ces qualités.


Kant assure que nos idées de l’espace infini et du temps infini ne sont pas basées sur une combinaison de notre perception empirique (objective) du temps et de l’espace finis, mais, plutôt, qu’elles sont apparentées à la capacité innée que nous avons d’expérimenter les choses comme existant ensemble et semblant se succéder. Cette faculté naturelle de concevoir les choses comme antérieures à une période, ou s’y passant, nous donne la notion du temps et d’espace ; lorsqu’on applique, ou qu’on étend, cette faculté au monde que nous percevons, elle le fait apparaître comme ayant des qualités spatiales et temporelles.


Kant appelle cette faculté innée « Lois de Relations ». Ces lois nous fournissent une unité synthétisante de toutes les diverses sortes de sensations qui sont les nôtres. Dans sa doctrine des qualités a priori de l’esprit, Kant déclare que l’être humain est né avec certaines qualités qui font la synthèse des sensations du monde.


Le temps et l’espace sont deux de ces qualités synthétisantes. Cependant, le temps et l’espace en particulier sont des qualités a priori. Kant dit que nous apparentons la notion d’espace aux formes des sens extérieurs. Nous concevons les objets extérieurs à nous comme ayant la qualité d’espace. Nous associons cette notion aux objets perçus par nos sens de la vue et du toucher. Réciproquement, Kant affirme que tous les objets de perception personnelle — nos pensées, la durée de notre conscience — sont perçus par nous en relation avec le temps. Ces sensations intérieures ne sont pas conçues sous la forme d’espace. En résumé, nous plaçons notre moi conscient dans la catégorie de temps, et le monde dans celle de l’espace.


L’espace paraît exister en-dehors de nous, mais le temps semble avoir besoin d’objets apparentés au moi. Nous pouvons dire que nous-mêmes, existons toujours en tant que temps, le présent quoique nous puissions penser. Mais nous pouvons percevoir un objet dans l’espace sans nous associer à lui.


Kant dit de plus que « la perception est individuelle », mais que les formes de temps et d’espace sont universelles. La manière, dont nous ressentons les choses comme existant dans le temps et l’espace, est purement individuelle. La forme particulière d’une chose, ses qualités spatiales, peuvent apparaître différemment à chacun de nous à cause de notre interprétation de ce que nous voyons. Mais la notion que la chose existe vraiment dans le temps et l’espace est universelle chez tous les hommes.


Avant de commenter la conception des ordres traditionnels (dont l’A.M.O.R.C.) de ces sujets, il est nécessaire de nous référer à nouveau à la théorie moderne de la Relativité. Antérieurement aux postulats d’Hermann Minkowski, mathématicien allemand, et, par la suite, aux travaux considérables d’Albert Einstein, on pensait en général que le temps et l’espace étaient des qualités indépendantes l’une de l’autre. On ne concevait pas qu’il y eut entre eux une quelconque relation directe, ou que le temps soit lié à l’espace. Maintenant, le temps et l’espace sont unis dans la théorie d’un continuum espace-temps. Le temps, en d’autres termes, dépend de la position de l’observateur. Pour citer le célèbre postulat d’Einstein « Tout corps référence (système coordonné) a son temps particulier ; à moins qu’on ne nous indique le corps-référence de la relation temps, le temps d’un événement est sans signification. »


Assez étrangement, il y a des siècles, le philosophe grec Épicure avait fait une déclaration similaire. « L’univers est infini, car le fini a une extrémité qui ne peut être observée que par rapport à quelque chose d’autre, ce qui est impossible dans le cas de l’univers. »


Comprenons un peu ce principe de la Relativité. Supposons que vous soyez assis dans un train et regardiez par la fenêtre. Le train est dans une gare, parallèle à un autre train. L’autre train semble vous dépasser lentement. Votre train est-il immobile et l’autre train est-il seul à bouger ? Ou les deux trains sont-ils en mouvement mais le vôtre avance-t-il plus lentement ? Vous ne pouvez répondre à ces questions qu’une prenant comme repère un corps inerte, quelque chose de relativement stationnaire.


Nous mesurons le mouvement, la vitesse relative d’un objet à la surface de la Terre — tels qu’une automobile, un train, un avion, une fusée — par rapport à l’inertie relative de la Terre. Celle-ci semble un point de repère stationnaire en comparaison de ces autres objets en mouvement. Néanmoins, nous savons que la Terre se meut également par rapport aux corps célestes et astres. Cependant, la vitesse des objets sur la Terre n’est pas vraie, si ce n’est par comparaison avec l’apparence relativement inerte de la Terre.


Le phénomène du raccourcissement apparent d’un objet en fonction de la vitesse de son déplacement vient renforcer la théorie d’Einstein sur la Relativité. Un objet se déplaçant à grande vitesse semble, pour l’œil se rétrécir par rapport à sa taille lorsqu’il est immobile. Les dimensions spatiales d’un objet dépendent donc de la vitesse à laquelle il se déplace. Une auto qui passe près de nous et s’éloigne à toute vitesse nous semble ensuite beaucoup plus petite que celle qui reste stationnée à proximité.


Pensons à deux étoiles A et B et à nous-même, C, observateur sur la Terre. Disons que A est à une distance de 500 années-lumière, B est à 800 de A. Une grande explosion se produit sur A. lorsque nous l’observons sur la Terre, C, elle est du passé. Mais pour un observateur quelconque sur B, elle ne s’est pas encore produite, car B est plus éloigné de A que ne l’est la Terre.


Pour l’A.M.O.R.C. et les ordres traditionnels, le temps et l’espace sont fondamentalement perceptifs, c’est-à-dire des états différents de conscience plutôt que des réalités absolues en elles-mêmes. Nous déclarons que l’espace, du point de vue perceptible, est un état qui semble vide d’objets. Nous savons cependant, dans la mesure où l’homme l’a déterminé, qu’il n’y a pas d’espace absolu, pas de véritable vide. Ce qui n’a pas de masse pour le remplir contient de l’énergie.


De plus, nous concevons le temps comme étant la durée de conscience, la mesure de la période de notre état de réalisation de quelque chose. Ces notions, nous le répétons, sont perceptives, ce sont de simples conditions des limitations de la conscience. Pour les ordres traditionnels, le temps et l’espace ne sont donc pas les réalités que nous percevons.


Ces points de vue de l’A.M.O.R.C. et des ordres traditionnels admettent cependant une relation espace-temps. Nous considérons qu’il y des facteurs, comme la vitesse de la lumière, la gravitation et le nécessaire point de référence où nous nous trouvons en tant qu’observateur qui ont un effet certain sur notre conscience, sur nos notions d’espace et de temps. Cependant, nous n’acceptons pas ces influences en elles-mêmes comme étant l’espace et le temps absolu.



3 — CONCLUSION


« Quand le Père qui l’avait engendré vit le monde en mouvement et en vie devenu le Temple des Éternelles Puissances, Il fut saisi d’admiration ; dans Sa joie, Il pensa à le rendre plus semblable encore à son modèle. Car de même que celui-ci se trouve être un « Vivant » éternel, de même Il s’efforça de rendre, dans la mesure du possible, cet univers éternel. (…) Aussi eut-Il l’idée de former une sorte d’image mobile de l’Éternité ; et tandis qu’Il organisait le Ciel, Il forma, d’après l’Éternité immuable en son Unité, une image à l’éternel déroulement rythmé par le Nombre, et que nous avons appelé le Temps, qui imite l’Éternité en décrivant des cycles au rythme des Nombres divins ». PLATON, Timée 452 c d, 453 a.


Le temps est une unité de CONTINUITÉ DE CONSCIENCE. Cette expression désigne la période pendant laquelle on est conscient de quelque chose. Le temps est donc l’évaluation de la période pendant laquelle on est conscient d’une chose. L’homme n’a connaissance du temps et de l’espace que par l’intermédiaire des ses cinq sens : vue, ouïe, toucher, goût et odorat. Mais ces cinq sens peuvent se tromper et causer une conception erronée du temps et de l’espace. Si l’un deux, par exemple, est défectueux, la conception du temps et de l’espace le sera aussi. L’intelligence de l’homme fonctionne au travers d’une dualité de conscience. Partout où il y a intelligence, il y a conscience. L’intelligence existe même quand le cerveau est endormi ou sous l’influence d’un stupéfiant. La conscience du cerveau est une conscience extérieure communément appelée conscience objective. Il y a donc, en l’homme une double conscience : d’une part, celle qui est mortelle et objective ; d’autre part, celle qui est subconsciente et divine.


Le temps et l’espace sont des concepts de la conscience humaine et physique. La conscience divine intérieure de l’homme n’est nullement limitée par le temps et l’espace. Le temps et l’espace sont des perceptions objectives qui n’affectent notre vie que dans sa phase physique transitoire. La conscience divine de notre être intérieur n’est nullement limitée aux fonctions de notre cerveau physique et périssable. La conscience objective du corps crée, elle-même, ses définitions et ses croyances selon les impressions passagères recueillies par les cinq sens. Dans sa conscience objective, l’homme est pratiquement asservi par les croyances établies par son cerveau physique. Comme conséquence de sa dualité, l’homme possède une conscience divine nettement distincte de sa conscience humaine. La conscience divine peut prendre conscience de tout ce qui existe et elle n’est jamais trompée par les impressions transitoires. La conscience divine gouverne et contrôle les fonctions créatrices de l’être humain. La matière, étant en perpétuel changement, n’est pas réelle. La conscience divine étant éternellement identique à elle-même, est la seule réalité.


Un peu de symbolisme


Le monde en tant qu’existence indéfiniment modulée est suspendu entre deux principes : l’Unité et la Multiplicité. Dieu l’Un, après avoir — avant le commencement de tout « temps » et de tout « cycle » — « émané » la Materia Prima, la pétrit de son Verbe et de ce geste naît le monde comme l’éclosion d’un indicible Fleur, Rose ou Lotus cosmique dont la contemplation en esprit permet à l’homme, en involution, de retrouver son propre « centre ». La vie du Monde est tout entière contenue dans ce gigantesque dialogue entre l’Un et le Multiple, incessante palpitation du Verbe en création continue que le Rythme des Cycles divins fait Musique. Dans une succession de « temps » comme emboîtés les uns dans les autres, l’influx divin tantôt se fait « création » et tantôt « destruction ». « Un » tantôt se démultiplie, semble-t-il à l’infini, et tantôt paraît vouloir « s’effondrer » à nouveau vers l’Unité, comme dans ces étoiles qui semblent avoir terminé leur existence cyclique, dont les atomes constitutifs « s’effondrent » sur eux-mêmes et dont la matière dite « dégénérée » (processus inverse de la « genèse ») atteint des densités inimaginables : les « naines blanches », dites « naines noires » lorsqu’elles en arrivent à ne plus diffuser aucune lumière.


C’est pourquoi après la spirale, une autre image encore plus vivante s’impose à nous lorsque nous voulons figurer mentalement l’idée du Temps cyclique et rythmique envisagé alors davantage dans sa permanence que dans son devenir : celle d’une respiration, celle d’un organisme vivant habité d’une pulsation régulière organisée autour d’un centre générateur. C’est là de tous les symboles du Temps le plus fécond peut-être pour l’investigation métaphysique, puisque nous y trouvons le schéma mental essentiel : l’idée cosmique de création (ou d’émanation) à partir du Principe transcendant, idée d’un monde manifesté qui s’étend de plus en plus loin de la Source, et qui périodiquement « inverse » son mouvement pour se refermer sur son centre, avant de s’engager dans une nouvelle période d’expansion. On sait que de nombreuses hypothèses cosmologiques envisagent ainsi pour l’ensemble du Cosmos une succession d’expansions et de contractions échelonnées sur des milliards d’années, et que l’univers serait en ce moment dans une phase d’expansion.


Comment ne pas penser ici analogiquement au système pulmonaire des animaux et des hommes, et surtout, bien sûr, au Cœur dont il est bien superflu de rappeler l’importance primordiale, et en particulier l’utilisation « chevaleresque », parmi tous les symboles spatio-temporels ? Après le Point placé au centre d’une Roue, le Cœur est le meilleur symbole du « moteur immobile » d’Aristote, de Celui qui meut sans être mû, le Principe suprême manifesté.


« Pourquoi le ciel se meut-il d’un mouvement circulaire ? — parce qu’il imite l’intelligence. Or l’intelligence se meut en restant immobile. Et c’est ainsi que l’univers se mouvant en cercle reste pourtant à la même place… » PLOTIN (Ennéades, II, 2)


« Ces choses ne pourront pas être comprises par la généralité, mais seulement par le petit nombre de ceux qui seront destinés à préparer, dans une mesure ou dans une autre, les germes du Cycle futur ». René GUÉNON Le règne de la quantité et les signes des temps.



Philippe LASSIRE



VOS COMMENTAIRES


En complément de ce que j’ai écrit, je pense qu’il est utile d’apporter un complément en ajoutant ces quelques lignes Jean Phaure prises dans son livre « Le cycle de l’Humanité Adamique » :

« Réfléchissons à la nature des phénomènes qui sont à la base de notre appréhension du temps : battements de notre cœur, heures du jour, saisons de l’année… Tous ont pour support, soit le mouvement d’un astre, — et particulièrement la rotation quotidienne de la Terre et sa révolution annuelle — soit le mouvement d’un organisme en vie. Ces mouvements conditionnent notre biosphère et sont les régulateurs fondamentaux, soit conscients, soit inconscients, de notre existence et de la subsistance de tout ce qui vit. Astres, cœurs poitrines, plantes, feuilles, animaux, hommes, voient le cours de leur manifestation soumis à une succession et une combinaison de phases évolutives et involutives, c’est-à-dire de cycles fondamentaux.
Le Temps a peu de prise sur la matière inanimée, du moins à l’échelle de nos vies. Il est au contraire le moteur direct et sensible de tout le monde vivant. Et ce " temps de vie " ne peut se représenter par une ligne droite indéfinie, mais par des courbes, voire des cercles, comme le cœur des astres et la figure de nos horloges. Il est habité de pulsations et d’incessants recommencements. Il est rythme et fait de quantités de temps mesurables assez subtilement emboîtées pour que ces quantités, devenues cycles, acquièrent un caractère qualitatif. Chaque " tour de roue " modifie ce Temps et cette Vie qui s’en nourrit. Le rythme interne, ontologique, de ce temps vivant, sera représenté par des cycles, où d’incessants recommencements ne marqueront pas des rapports d’identité mais d’analogie.
Alors que l’Espace nous donne souvent (du moins à l’échelle de nos sens) l’idée d’une quantité indifférenciée dont les mesures semblent arbitraires, le Temps, en ses pulsations, révèle immédiatement une harmonie transcendante. Biosphère et Cosmos y dialoguent, car l’un et l’autre parlent la même langue, celle des nombres. Et les cycles de la vie terrestre, du microcosme, sont en étroit rapport d’analogie avec ceux du cours des astres, du macrocosme. Cette analogie est la base de la notion d’astrologie, science immémoriale des cycles du Temps qualifié. Le mouvement circulaire des astres, et principalement bien sûr du Soleil et de la Lune, — avec ou sans référence à des " divinités " correspondantes — sont les témoins visibles de ces " éternels retours ", sont les horloges fondamentales de nos rythmes vitaux, et constituent les " modèles " de nos propres cycles ».

Le sujet est extrêmement vaste, voire infini car on peut également étudier le temps dans : l’art, la religion, la biologie, la physique, la médecine, les traditions, l’astronomie, la mythologie, la psychologie, la philosophie…


Je suis maintenant une fidèle de votre site dont j’apprécie beaucoup la qualité, la diversité et parfois l’audace à «sortir des sentiers battus», comme vous le dites en langue française. A ce jour, tous mes élèves sont allés sur votre site et ils paraissent intéressés, car mon cours aborde maintenant le temps et les philosophes qui ont écrit sur ce sujet. Un de mes élèves m’a demandé de vous communiquer cette pensée de Saint Augustin afin que vos lecteurs méditent sur elle : «Formé du passé qui n’existe plus, de l’avenir qui n’existe pas encore et de l’instant présent qui n’est qu’une limite entre deux mondes irréels, le temps reste paradoxalement insaisissable, alors que nous y sommes plongés sans pouvoir jamais en faire abstraction»

Je suis très contente, cette année, de mes élèves et c’est pour cela que je me suis permis de donner l’adresse de votre site. Si vous veniez un jour à Rio, je serais heureuse de vous rencontrer.

Je souhaite pouvoir vous lire le plus longtemps possible et bonne continuation dans vos travaux.
Avec toutes mes amitiés.


Je suis bien entendu enchanté que vous ayez travaillé avec vos élèves sur mon thème ci-dessus. N’étant en aucune manière professeur de philosophie agréé, je ne peux qu’être heureux de cette appréciation venant d’un professeur diplômé et de ses élèves. La citation de Saint Augustin, proposée par votre élève, complète bien ma réflexion.

Pour continuer le plaisir, je suis tenté de vous soumettre en retour cette définition de Bergson :
« Mais la nature véritable du temps risque de nous échapper si nous en faisons un milieu homogène à la manière de l’espace, en raison peut-être d’une visée utilitaire : la mesure du temps passe par celle de l’espace parcouru par un mobile dont le mouvement est uniforme. On aboutit alors à un temps abstrait et régulier fort différent de la durée vécue que nous suggère l’expérience intérieure faite de changements qualitatifs à l’imprévisible nouveauté. La durée ainsi définie constitue une unité organique — comparable à celle de la mélodie — qu’il serait artificiel de découper en instants séparés ».

Voilà, Chère Olivia, j’ai fait de mon mieux pour étendre un temps soit peu le concept de temps. Je n’envisage pas pour l’instant d’aller à Rio, mais vous êtes la bienvenue si vous faites un voyage en France. À vos élèves et à vous, je vous adresse toute mon amitié.


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Philippe Lassire
Philippe Lassire
Auteur du site
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